Monteverdi, portrait polyphonique

Ensemble Vocal Buissonnier
Ensemble instrumental
Pierre-Louis Rétat, direction

Claudio Monteverdi (1567 – 1643) est un pont, un véritable isthme entre les sphères sacrée et profane, entre les époques et les styles, convoquant avec maestria les arcanes de la polyphonie renaissante dans ses messes, tout en s’imposant comme un avant-gardiste, notamment dans les genres de l’opéra et du madrigal qu’il porte à un haut degré d’incandescence.
Depuis longtemps l’Ensemble Vocal Buissonnier caresse le désir de se frotter à l’expressivité et à l’inventivité de ce génie, chez qui tout geste musical souligne et sublime le sens du mot et de la phrase, qu’ils soient empruntés à Pétrarque, au Tasse ou aux psaumes du prophète Jérémie. Cette exploration des affects baroques et des passions de l’âme se concrétise en avril 2024, porté par la sensibilité du claveciniste et chef Pierre-Louis Rétat, intime connaisseur du maître de chapelle de Saint- Marc, de son contrepoint et de celui de ses contemporains.
Le programme a été pensé pour faire dialoguer des œuvres emblématiques des trois grands corpus chorals de Monteverdi – le 8ème Livre de madrigaux, les Vêpres et la Selva Morale et Spirituale – et pour souligner la porosité entre inspirations profanes et sacrées. Ainsi, deux Contrafacta seront également interprétés, c’est-à-dire des madrigaux de Monteverdi auxquels Aquilino Coppini a substitué un texte liturgique en adéquation avec les affects de la polyphonie vocale, menant cette musique vers de nouveaux horizons. Coppini, dans une lettre à l’humaniste Erycius Puteanus, offre d’ailleurs de précieuses informations sur l’interprétation de ces œuvres, profondément théâtrales, auxquelles les chanteurs et les musiciens impliqués dans le projet ne manqueront pas de se référer durant le travail de préparation : « les pièces de Monteverdi nécessitent des pauses plus longues, se reposant de temps en temps, permettant des ralentissements, et parfois même en continuant. Il y a en elles un merveilleux pouvoir d’émouvoir les passions à l’extrême » (1613).
Les huit chanteuses et chanteurs de l’Ensemble Vocal Buissonnier seront accompagnés par deux dessus (flûte et violon) et un continuo constitué d’un théorbe, d’une basse d’archet, de l’orgue et du clavecin de Pierre-Louis Retat. Cet effectif est idéal pour mettre en évidence les contrastes et les textures de la musique du début du baroque italien, notamment les fameuses Sonata de Dario Castello, violoniste à la chapelle de Saint-Marc de Venise sous la direction de Claudio Monteverdi. Un travail sur les textes chantés et une réflexion sur la mise en espace achèveront de colorer cette expérience hautement immersive et plurielle, témoignant une fois de plus à quel point la musique de Monteverdi, du haut de ses quatre cents ans, a gardé toute sa fraicheur, toute sa modernité.